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Pour un développement complet de l'enfant et de l'adolescent.

Rapport de la commission Enfance et adolescence François de Singly et Vanessa Wisnia-Weill

"Le présent rapport, qui résulte du travail conduit sous la présidence de François de Singly, surprendra sans doute. Plutôt que de dresser le catalogue des dispositifs à réformer et des mesures à introduire, il nous invite d’abord à déposer les œillères avec lesquelles trop souvent nous examinons séparément les politiques de l’éducation et de la famille, ou bien segmentons les approches de l’enfance, de l’adolescence et de la jeunesse."
En introduction de ce rapport commandé par France Stratégie (réactivation de ce qui était le Plan), Jean Pisani Ferry en expose la philosophie et les deux principaux motifs : « Le premier est qu’il est impossible de faire comme si la pauvreté monétaire, qui touche plus d’un tiers des familles monoparentales, le manque de centaines de milliers de places d’accueil collectif pour la petite enfance et l’échec scolaire étaient des problèmes extérieurs les uns aux autres.
Le second est qu’une politique publique compartimentée en autant de silos qu’il se trouve de ministères compétents et d’objectifs distincts manque nécessairement son objet : celui d’un développement à la fois cognitif, personnel et social, qui se construit à travers ces divers âges de la vie que nous nommons enfance, adolescence et jeunesse. »

Ce rapport met au centre la vie affective des jeunes, le rôle de l'école dans la qualité du lien social et l'importance du soutien de la parentalité.
"Ses orientations centrales recoupent en partie les analyses classiques sur le décrochage,les niveaux scolaires, le harcèlement et le climat scolaire, la confiance dans les autres et l’estime de soi, la pauvreté."
J'invite à lire attentivement les orientations proposées, qui impliquent une ouverture de l'école sur l'environnement et font penser aux fondamentaux de la pédagogie institutionnelle.

Le rapport est structuré en trois grands axes.
Premier axe – Former un individu relié à autrui et capable d’agir en coopérant ; Former par l’expérience aux liens humains : faire ensemble, se lier:

  • ORIENTATION N° 1 Bâtir un socle obligatoire de formation par l’expérience pour forger du commun et nouer des liens humains diversifiés, du primaire à la fin du secondaire.
    Rendre obligatoires des activités pratiques qui offrent aux enfants et aux adolescents des occasions encadrées de vivre des expériences où ils peuvent se lier à d’autres et développer leur capacité d’interagir avec autrui, qu’il s’agisse de proches ou de liens plus impersonnels.
    Pour une grande part, ces activités (qui pourront préfigurer le service civique) n’auront pas vocation à être dirigées par les enseignants et pourront se dérouler dans ou hors les murs de l’école. L’école les reconnaîtra en les validant dans le cursus scolaire mais sans notation, en prenant en compte l’assiduité, en organisant des restitutions en classe ou au sein de l’établissement et, le cas échéant, en les faisant figurer dans un livret inspiré du livret expérimental de compétences. Sur un cycle donné d’enseignement, tous les élèves devront avoir validé au moins une expérience sur chacune de ces activités (« faire » avec des amis, « faire » en groupe collaboratif, aider/prendre soin, etc.).
  • ORIENTATION N° 2. Forger du commun dès le primaire, par l’organisation même des enseignements et en luttant contre l’isolement affectif des enfants et des adolescents : dans la mesure du possible, ne pas séparer les amis dans la formation des classes, favoriser les travaux en petits groupes sous la responsabilité des enseignants pour éviter l’isolement de certains élèves, etc."
  • ORIENTATION N° 3. Apprendre à faire face à la violence dans l’apprentissage des relations, en rendant visibles et concrètes les règles et les références communes (langue française, valeurs républicaines ancrées dans l’histoire de France, civilité) et en encourageant la pratique de la parole mutuelle à l’école, le tout étant garanti par des adultes référents dans une communauté scolaire impliquée et soudée.
  • ORIENTATION N° 4. Faire évoluer le cadre légal des relations entre parents et enfants.
    Propositiona. Condamner par principe les châtiments corporels et dégradants dans le code civil, conformément aux recommandations du Conseil de l’Europe et du Comité des droits de l’enfant des Nations unies.
    Proposition b. Instaurer une capacité progressive de « refus » au lieu de l’incapacité civile.
  • ORIENTATION N°5. Sanctuariser un temps parental et favoriser des organisations du travail permettant un investissement multidimensionnel plus paritaire des pères et des mères, pour améliorer la qualité et la quantité des temps parentaux.
Deuxième axe – Mieux cultiver les capacités et les talents. Concilier l’exigence du dépassement de soi et l’apprentissage par tâtonnement :
  • ORIENTATION N°6. Développer dès le collège un nouveau système de validation des acquis plus modulaire et cumulatif, sur le modèle des unités de valeur universitaires, offrant une diversification et une personnalisation des champs de formation des capacités, et articulé à un tronc commun rigoureux resserré.
  • ORIENTATION N° 7. Faire évoluer la notation pour valoriser les progrès et se doter de moyens d’évaluer des modules moins académiques.
  • ORIENTATION N° 8. Faire preuve d’une exigence accrue sur la maîtrise du français, la formation au raisonnement, à l’esprit critique et à la narration, afin d’inscrire les logiques d’individualisation partielles du parcours scolaire dans des normes communes et un vivre ensemble.
  • ORIENTATION N° 9. Renforcer l’articulation entre l’école et les parents.
    Proposition a. Mieux informer les parents du niveau que doivent atteindre leurs enfants en fin de cycle des apprentissages fondamentaux sur le pilier « lire, écrire, compter » (ressources en ligne avec des exemples concrets, des bases de données d’exercices par niveaux et des tutoriels).
    Proposition b. Accroître l’ouverture de l’école et du collège en explorant plusieurs pistes : participation occasionnelle des parents en classe, moments réguliers de convivialité, formations offertes aux parents, etc.
  • ORIENTATION N° 10. Développer le travail en réseau des enseignants : les aider à se constituer en communauté apprenante, qui échange sur les pratiques pédagogiques les plus efficaces pour l’apprentissage de la lecture et du calcul, et sur les solutions apportées à des besoins éducatifs particuliers. Dans le prolongement du projet D’COL1, le ministère de l’Éducation nationale pourrait élaborer une plateforme collaborative ouverte avec une architecture lisible et des ressources étoffées. Cette plateforme inclurait des pratiques pédagogiques évaluées, des bases de données d’exercices, par niveau et avec tutoriel (en commençant par le primaire, en français et mathématiques), des modules d’échange réservés aux enseignants et une cartographie des ressources nationales et locales (par exemple, le lien avec des enseignants spécialisés, des contacts avec les secteurs sanitaires et médico-sociaux pour approfondir la démarche de constitution d’un «pôle ressource de circonscription», etc.). Les internautes pourront commenter/ajouter des ressources, l’instance de pilotage régulera et complétera. Laisser davantage d’initiative aux chefs d’établissement pour impulser des méthodes de travail plus collaboratives intégrant le numérique et pour mettre en œuvre un projet éducatif adapté à leur communauté scolaire et respectueux des standards nationaux de niveaux relève de la même logique.
  • ORIENTATION N° 11. Développer des filières d’excellence dans l’enseignement professionnel.
Troisième axe – Renforcer la protection et favoriser l’égalité d’accès aux ressources Promouvoir des liens sécurisants, lutter contre la maltraitance et recentrer la protection sur les besoins de l’enfant
  • ORIENTATION N° 12. Soutenir le droit des enfants à développer des liens avec leurs proches, sous réserve de l’intérêt de l’enfant, avec plusieurs volets (situations de séparation conjugale, parents incarcérés, présence facilitée des parents auprès des enfants malades).
    Un curseur spécifique est à trouver entre maintien des liens pour les enfants placés et possibilité de recréer des liens stables et sécures dans une autre famille ou auprès de tiers pour les enfants en danger.
  • ORIENTATION N° 13. Organiser une conférence de consensus pour élaborer des référentiels et des seuils d’alerte partagés, développer l’expertise des professionnels en matière de maltraitance afin de pouvoir, le cas échéant, déclencher plus rapidement les dispositifs de protection renforcée.
  • ORIENTATION N° 14. Promouvoir l’accueil en petites unités et recentrer la prise en charge sur le care.
  • ORIENTATION N° 15. Former et informer les parents, coordonner les acteurs de l’éducation à la santé pour repérer plus facilement les signaux d’alerte sur un mal-être en voie d’installation, et accompagner la prise en charge, en particulier chez les adolescents et les jeunes enfants de parents isolés. Les PMI pourraient être mieux dotées et développer les visites à domicile ciblées en périnatalité intégrant un travail sur les relations parents-enfants.
  • ORIENTATION N° 16. Réformer les aides financières aux familles de manière à réduire l’écart entre taux de pauvreté des enfants et taux de pauvreté des adultes, en le ramenant a minima au niveau atteint avant la crise.
  • ORIENTATION N° 17. Développer un plan d’accueil universel de qualité des enfants en commençant par un ciblage en faveur des moins aisés, mais avec un objectif universel à horizon 2025-2030. L’objectif à dix-quinze ans serait de 90 % d’une classe d’âge effectivement accueillie dans ces structures à partir de l’âge d’un an, à un rythme régulier (au moins quelques heures par semaine).
  • ORIENTATION N° 18. Élaborer des schémas territoriaux pour proposer une offre de services décloisonnée permettant de construire des parcours variés qui stimulent le développement des enfants, en partenariat avec les parents. On veillera spécifiquement à intégrer quatre dimensions : l’accueil universel des jeunes enfants, l’offre culturelle et d’activités, le tissage des liens parents- enfants dans le soin et le jeu, et enfin la lutte contre la précarité.

Pour en savoir plus, voir le site web : www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs_rapport_commission_enfance_29092015_bat.pdf

Date de cet article : 2016-02-13


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