philippefabry.eu, pour la formation en travail social Philippe Fabry » Formation » Témoignages et analyses » Fernand Deligny, un des modèles fondateurs de l'éducation spécialisée. Fernand Deligny, un des modèles fondateurs de l'éducation spécialisée."Fernand Deligny, d’abord instituteur, admirateur et praticien des méthodes pédagogiques conçues par Célestin Freinet, ouvre à Lille, en 1943, en pleine guerre, son premier lieu d’accueil. Il y reçoit des adolescents délinquants. D’autres expériences suivront dont la plus connue est la Grande Cordée. Il s’agissait, en s’appuyant sur un réseau informel de militants (communistes le plus souvent) et sur les auberges de jeunesse, d’extraire les jeunes délinquants de leur territoire de misère et de leur proposer des lieux d’existence ouverts et bienveillants. Plus tard, sa rencontre avec les enfants autistes infléchira le cours de son existence. Il rompra alors avec "l’institution" et mènera avec quelques-uns, en Cévennes, une expérience originale et quasi autarcique de vie partagée. Écrivain fécond, Deligny a développé dans plusieurs ouvrages ses conceptions de l’action éducative. Deux d’entre eux, "Graine de crapule"? et "Les vagabonds efficaces"?déploient ses idées et ses prises de position à propos des adolescents délinquants. Ils ont eu un grand retentissement. Dans des temps où notre société s’inquiète de sa jeunesse, la radicalité de ses options et la profondeur de son engagement méritent de retenir notre attention. On chercherait en vain dans son œuvre une quelconque référence aux sciences de l’homme. Mieux, il développe une méfiance et une critique radicale au regard de la psychologie et de la psychanalyse. Il leur dénie toute pertinence en matière d’éducation : « Quand tu auras passé trente ans de ta vie à mettre au point de subtiles méthodes psycho-pédiatriques, médico-pédagogiques, psychanalitico-techniques, à la veille de la retraite, tu prendras une bonne charge de dynamite et tu iras discrètement faire sauter quelques pâtés de maison dans un quartier de taudis. En une seconde, tu auras fait plus de travail qu’en trente ans". Il considère leurs contenus inutiles à celui qui revendique une posture d’éducateur : « Epileptoïde, déprimé, hypo-maniaque… Voilà qui regarde le médecin. Toi ton refrain doit être : fais-les jouer." Il est proche en cela d’Anton Makarenko pour lequel l’éducateur « s’évertue alors à singer la médecine et ratiocine en prenant l’air intelligent?lorsqu’il s’adonne à l’anamnèse". Deligny réfute l’axiome selon lequel la délinquance est un trouble de la personnalité et substitue une approche phénoméno-logique et situationnelle aux interprétations personnalistes. Il voit les adolescents délinquants comme des êtres saisis dans les rets de l’absurdité et de la cruauté du monde. Il évoque constamment un monde proche de celui d’Albert Camus par l’absurde qui le caractérise, dans lequel les délinquants sont englués. Il conçoit l’acte délinquant comme l’ultime tentative pour rester vivant. La délinquance est pour lui l’échec d’une société, jamais celui de la personne. À partir d’une lecture politique, il reproche aux diverses psychologies d’en chercher les causes dans le sujet, alors qu’elles sont dans le social." Yves Jeanne Fernand Deligny : liberté et compagnonnage
Trois émissions de France Culture nous donnent l'occasion d'entendre longuement Fernand Deligny : Date de cet article : 2017-09-09 Philippe Fabry » Formation » Témoignages et analyses » Fernand Deligny, un des modèles fondateurs de l'éducation spécialisée. |