Engagement des jeunes dans le trafic Quelle prévention ?

L'introduction du rapport de cette recherche, dirigée par Pascale Jamoulle et Pierre Roche, en présente ainsi les quatre parties :

"La première partie porte sur le sens des engagements des jeunes dans l’économie de la rue. Ils procèdent de fortes dynamiques groupales mais aussi d’un processus de fragilisation fait tout à la fois de mises à l’écart scolaire, de relégations professionnelles, de ruptures familiales... Les trafics ont aussi une fonction économique, de résistance à la paupérisation, de soutien au budget familial, ils ouvrent des possibilités en termes d’accumulation de capital. Nous tenterons aussi d’accéder aux sens subjectif de ces parcours, quand ils satisfont un besoin d’adrénaline ou encore répondent à une quête de virilisme.

La deuxième partie restitue les parcours de ces jeunes dans l’économie de la rue, en précisant que ces derniers n’en constituent que les « petites mains ». Après avoir décrit son organisation et les principales formes de la division sociale et technique du travail qui la structurent, nous chercherons à comprendre ce qui permet aux jeunes de s’y maintenir malgré tous les affects pénibles (culpabilité, peur, angoisse…) auxquels ils doivent faire face. Nous mettrons enfin l’accent sur les risques d’enkystement dans les business mais aussi sur les mouvements de sortie, de désengagement, de mise à distance.

La troisième partie aborde la façon dont les trafics viennent perturber les institutions et, corrélativement, la façon dont les professionnels qui travaillent dans ces dernières se positionnent par rapport aux jeunes qui y sont engagés. Côté perturbations, nous montrerons notamment que des leviers d’intégration sociale deviennent inopérants, que la confiance mutuelle est mise à mal par l’omerta requise dans le trafic ou encore que la violence qu’il génère est susceptible d’induire chez les professionnels une incertitude concernant leurs savoirs et savoir-faire. Côté positionnements, il était difficile de ne pas évoquer le parti pris de la proximité car nous avons bien conscience qu’il conditionne l’efficacité du travail engagé auprès des jeunes impliqués dans le trafic. Nous traiterons ensuite de l’accompagnement et de ses enjeux et tenteront d’identifier les moments les plus propices à l’intervention. Nous nous interrogerons sur les différentes façons d’intervenir auprès des groupes ainsi que sur le partenariat de proximité, lequel s’impose sur le mode de l’exigence mais semble difficile à mettre en œuvre. Nous tenterons, dans cette perspective, de donner quelques clés afin de surmonter ses difficultés et de favoriser sa réussite.

La quatrième partie propose des pistes de travail originales. Elle insiste, en amont, sur la nécessité d’intervenir sur les politiques d’évaluation elles-mêmes, notamment en faisant vivre le principe de leur co-construction avec les professionnels mais aussi les usagers. Plus loin, nous restituerons tout ce qui a progressivement émergé au cours des échanges afin de prévenir l’engagement des jeunes dans le trafic. Dans cette perspective, nous préconiserons l’agir professionnel qui s’appuie sur l’initiative des habitants et favorise l’augmentation du pouvoir d’agir collectif. Nous soutiendrons aussi la coéducation ; l’appropriation critique du modèle de la réduction des risques ; la promotion de la santé, la mise en place de dispositifs permettant le transfert des compétences acquises dans l’illicite dans le champ du licite ou encore de supports créatifs. Cette deuxième partie s’achève en ouvrant un débat sur la question de la dépénalisation.