Un premier intérêt de ce rapport est dans la définition de la notion de diversité, notion très floue.
Le rapport débute donc avec des définitions précises et un schéma de départ très clair.
Par exemple le découpage de l'Afrique subsaharienne entre Afrique sahélienne et Afrique guinéenne ou centrale est instructif, montrant de réelles différences.
L'intérêt est ensuite de donner beaucoup d'informations sur les parcours. Exemple : "La période d’arrivée des immigrants est très liée à leur origine géographique : la moitié des immigrés d’Asie du Sud-Est est arrivée en 8 ans tandis que la migration algérienne s’étend sur une longue période : 90 % L'étude eux sont arrivés entre 1968 et 2004, soit une amplitude de 36 ans. Pour la plupart des origines, la moitié des immigrés est venue à l’âge adulte, et les trois-quarts sont arrivés avant 30 ans ; 89 % des immigrants n’ont pas séjourné dans un autre pays avant de rejoindre la France métropolitaine."
Autre exemple : il n’est pas rare que les couples africains fonctionnent sur un mode transnational : le père et la mère ne résident pas dans le même pays et l'enfant peut circuler entre ses deux parents.
L'étude pointe que dans les familles africaines, l’éducation des enfants ne relève pas exclusivement des parents et il n’est pas rare qu’un enfant soit confié à l’un de ses grands-parents, oncles ou tantes pour une période plus ou moins longue. Ce système de « confiage », fréquent à l’intérieur même de l’Afrique, semble se maintenir au-delà des frontières".
Le rapport analyse la tension entre les politiques d'assimilation et les politiques de double appartenance : "L’opinion selon laquelle « il faut faire oublier ses origines pour se faire accepter en France » est partagée par un tiers des personnes interrogées dans L'étude Trajectoires et Origines. Elle traduit l’idée assimilationniste selon laquelle s’intégrer requiert des immigrés, comme de leurs descendants, de rompre les liens avec leur pays d’origine. D’un autre côté, les politiques de co-développement – en plein essor en France comme dans l’Union européenne – voudraient faire des migrants les principaux acteurs du développement de leurs pays d’origine.
Pris entre ces injonctions contradictoires, les immigrés auraient à choisir entre ici et là-bas. "
Les chercheurs éclairent ce débat et particulièrement celui entre assimilationniste (pour s'assimiler il faudrait rompre avec sa culture) et transnationalisme (ceux qui peuvent s'engager dans le transnationnalisme sont les plus intégrés): "L'étude permet d’explorer cette hypothèse en mesurant l’association entre l’intensité des pratiques transnationales et le ressenti des discriminations selon l’origine. Il apparaît clairement que plus les individus sont « transnationaux » et plus ils déclarent avoir vécu des discriminations (figure 1).
Le taux d’auto-déclaration de discriminations subies dans les cinq dernières années est de 10 % pour les descendants d’immigrés qui n’ont aucun rapport avec l’étranger ; il est six fois plus élevé pour ceux qui cumulent au moins neuf pratiques transnationales."
Le chapitre portant sur le pluri-linguisme, à l'oral, à l'écrit, en lien ou non avec la mixité du couple parental, est passionnant
Introduction du rapport :
"Améliorer les connaissances sur les trajectoires sociales et les conditions de vie des migrants et leurs descendants dans la société française paraît nécessaire pour éclairer les débats publics sur l’immigration dans un contexte où des politiques d’égalité et de lutte contre les discriminations liées à l’origine sont mises en œuvre et réclament des outils de diagnostic et de suivi.
C’est pour répondre à ce besoin de connaissances statistiques que L'INED et L'INSEE se sont associés pour réaliser une enquête spécifiquement dédié à l’étude de la diversité des populations en France et au thème des discriminations. Intitulée Trajectoire et Origines (TeO) : Enquête sur la diversité des populations de France, cette enquête d’envergure a été réalisée entre septembre 2008 et février 2009 en France métropolitaine sur un échantillon de 21 000 personnes : immigrées, natives d’un DOM, descendantes d’immigrés, descendantes d’originaires d’un DOM, natives de France métropolitaine dont aucun parent n’est immigré ou originaire d’un DOM.
Elle vient combler une lacune dans les connaissances statistiques concernant ces populations minoritaires qui ont, certes, fait l’objet d'études ces dernières années, mais jamais avec ces tailles d’échantillon et un questionnaire couvrant autant de domaines de la vie sociale. L'étude Trajectoires et Origines cherche à appréhender dans quelle L'étude les origines migratoires (géographiques ou nationales) sont susceptibles de modifier les conditions et chances d’accès aux biens, services et droits qui fixent la place de chacun dans la société : logement, éducation, emploi et promotion, services publics et prestations sociales, santé, relations sociales, nationalité et citoyenneté... L’enquête traite de la situation sociale des personnes au moment de l'étude s’intéresse aux conditions de vie ainsi qu’aux expériences. Le titre de L'étude contient le terme «trajectoires » au pluriel, ce qui renvoie à la volonté d’étudier les parcours de vie, dans tous les aspects de la vie en société.
L'étude accorde, de ce fait, une grande importance à retracer les trajectoires de vie des individus : trajectoires scolaires, professionnelles, résidentielles, matrimoniales ou de santé. L’ambition de L'étude est d’examiner quel est l’accès aux ressources des immigrés et de leurs enfants nés en France. Elle permet de mettre en évidence d’éventuelles inégalités en tentant de dégager ce qui relève de logiques individuelles ou collectives et ce qui relève d’obstacles et de contraintes contextuelles en tous genres (discriminations, type d’habitat, conjoncture économique, etc.).
Le devenir des enfants d’immigrés, par comparaison avec le destin de leurs parents, est au cœur des analyses de L'étude. Connaissent-ils une mobilité sociale et résidentielle comparable à celle suivie par les milieux populaires dans les années 1960 ou l’ascenseur social s’est-il durablement bloqué pour cette génération ? Et quel rôle joue l’origine dans ces processus de mobilité ?
En définitive, tout en rendant compte de la pluralité des expériences rencontrées par les immigrés et leurs descendants, L'étude vise à mettre en évidence les dynamiques de différenciation et d’homogénéisation entre groupes d’origine et à l'intérieur des groupes (en incluant les personnes nées françaises en France). Tout autant que l’accès aux ressources, L'étude des Trajectoires et Origines permet aussi d’étudier leur mobilisation dans différents contextes (éducation, emploi, logement). Identifier les moments clefs où les discriminations se produisent dans le parcours des personnes est l’un des objectifs majeurs de L'étude.
Ainsi, sont abordées l’ensemble des situations où des traitements injustes ou inégalitaires peuvent se produire : l’orientation scolaire, les recherches d’emploi, les conditions de travail, les relations avec les collègues ou supérieurs hiérarchiques, les recherches de logement, les consultations médicales, les démarches dans les administrations.
L'étude s’attache aussi à mesurer L'expérience du racisme subi dans l’espace public (rue, magasins, banques, lieux de loisirs, rapports avec les agents d’autorité et le sentiment d’appartenir ou non à une minorité, éventuellement stigmatisée (1)."